Les pleurs chez les tout-petits
Quand on pense aux pleurs des enfants de 18 mois à 6 ans, on s’éloigne un peu des besoins primaires mentionnés hier par notre intervenante invitée de chez Naissance Renaissance Estrie.
Évidemment, un enfant qui a faim, qui a froid, qui est fatigué, qui est souffrant, pourra manifester son besoin par des pleurs. Toutefois, les enfants de cette tranche d’âge ont différents acquis qui leur permettent de les exprimer. Leur langage et leur motricité globale leur sont de précieux outils! Ils sont donc de plus en plus autonomes à répondre eux-mêmes à certains besoins ou à les exprimer de façon à ce qu’ils soient satisfaits plus rapidement.
Dans la vie en service de garde, il est donc plutôt rare d’entendre des pleurs d’enfant en lien avec des besoins primaires. Les pleurs sont maintenant associés à des émotions. Et je ne vous apprends rien si je vous dis que la gestion des émotions représente un travail énorme et laborieux, autant pour les éducateurs que pour les enfants!
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’en tant qu’intervenants en petite enfance, nous nous préoccupons grandement de cet aspect du développement de nos tout-petits. Au cours d’une seule journée, un enfant peut vivre un éventail d’émotions variées : joie, excitation, ennui, tristesse, contrariété, frustration, colère, etc.
Notre travail de tous les jours est donc d’accompagner nos cocos afin de les aider à prendre conscience des émotions qui les habite (une à la fois!) et d’en comprendre les manifestations qui en découlent (pleurs, agressivité, impatience, agitation, etc.). Cet accompagnement peut se faire de différentes façon, mais l’accueil et l’écoute sans jugement reste la clé!
En tout temps, l’enfant doit sentir que son émotion est légitime. Il aura besoin de nous pour l’aider à identifier son émotion et à en comprendre la cause, la source. Il aura aussi besoin de nous pour regarder la manifestation de cette émotion parce qu’elle ne sera pas toujours adaptée ou adéquate. Par exemple, mordre, frapper ou bousculer peuvent être des façons d’exprimer une émotion, mais ne seront aucunement utiles ou constructives, bien au contraire!
Des techniques comme le reflet ou la reformulation (l’aider à mettre des mots sur ce qu’il ressent) permettront souvent à l’enfant de prendre conscience de l’émotion qui l’habite afin de l’exprimer « de la bonne manière ». Parce que OUI, il est essentiel d’exprimer ses émotions! Parce OUI, il est essentiel d’être entendu et non ignoré! Les réactions des adultes face à ses émotions auront un impact fondamental dans le développement de l’estime de soi de l’enfant. Donc, en accordant de l’importance au vécu émotionnel, nous accordons de la valeur à l’enfant.
En ce sens, j’aime beaucoup cette façon plus scientifique d’exprimer le rôle essentiel de l’adulte auprès de l’enfant lorsqu’on parle d’accompagner un enfant dans son vécu émotionnel : « Lorsque l’enfant n’est pas consolé, rassuré, pris en compte dans son émotion, il vivra du stress de manière excessive, ce qui n’est pas souhaitable pour son cerveau en développement. C’est pourquoi, il est particulièrement important de faire preuve d’empathie. Envers soi même d’abord (sentir et comprendre nos propres émotions) et envers son enfant (entendre, ressentir, comprendre ses émotions)… ». (Comprendre et accompagner les émotions de l’enfant, BabyBaboo)
Parce que les exemples concrets nous permettent souvent de mieux comprendre, en voici un :
Il est 11h00 et Léon, 3 ans, pleure. Son éducatrice qui le connaît bien et qui est au courant de sa mauvaise nuit de la veille, s’approche de lui, se penche pour se mettre à son niveau et lui tend les bras.
L’éducatrice : « Tu pleure Léon. Tu as de la peine? »
Léon : « Oui! »
L’éducatrice : « Est-ce que tu sais pourquoi tu es triste? »
Léon : « C’est Justin! Il m’a poussé! »
L’éducatrice : « Et tu n’as pas aimé que Justin te pousse. Peux-tu le dire à Justin? »
Léon : « Justin, je n’aime pas quand tu me pousses! »
L’éducatrice : « Bravo Léon. Est-ce que tu te sens mieux maintenant que Justin s’est excusé? »
Léon : « Non »
L’éducatrice : « Est-ce qu’il y a autre chose qui te fait de la peine? »
Léon : « Je ne sais pas »
L’éducatrice : « Il est 11h00, nous allons dîner bientôt. Est-ce que tu as faim? »
Léon : « Oui! »
L’éducatrice : « Après le diner, nous ferons un petit repos. Crois-tu que ça te fera du bien? »
Léon : « Oui! »
L’éducatrice : « Alors, tu es triste parce que tu as faim et tu es fatigué en même temps? »
Léon : « Oui! »
L’éducatrice : « Je te comprends Léon. C’est normal que tu aies faim à cette heure-ci et que tu sois fatigué aujourd’hui. Ta maman m’a informée de ton réveil pendant la nuit. Viens avec moi, nous allons nous préparer au repas et tu pourras bientôt te reposer un peu. Tu te sentiras beaucoup mieux pour jouer avec tes copains cet après-midi après la sieste. »
Dans cet exemple, l’éducatrice a accueilli l’enfant dans son état et l’a aidé à mettre des mots sur son émotion. Du haut de ses 3 ans, Léon n’avait ni le vocabulaire ni la maturité pour exprimer clairement son besoin. Cette intervention a donc permis à Léon de reconnaitre son état et de trouver une façon d’être apaisé.
En service de garde, nous travaillons beaucoup avec les pictogrammes qui illustrent les différentes émotions. Tous les matins lors du « circle time » chez Hibouge et Bilingo, les enfants ont l’occasion de parler de leur état et de l’associer à une émotion. Cet exercice est simple et amusant et permet à l’enfant d’acquérir rapidement la capacité de reconnaitre les émotions, tant les siennes que celles de ses pairs. Nous utilisons également un support audio-visuel pour certaines comptines et chansons comme celle sur les émotions : Hello!
Nous abordons également le thème des émotions avec la littérature jeunesse. Je vous présente ici trois ouvrages que nous aimons particulièrement!
Pour faire un lien avec ton questionnement, Pascale, il arrive fréquemment qu’un enfant pleure en quittant le service de garde. Ces pleurs peuvent vouloir dire plusieurs choses. Pour un enfant qui intègre un nouveau service de garde, les pleurs pourront peut-être vouloir dire : « Maman, j’avais hâte de que tu arrives et je suis très heureux que tu aies pensé à venir me chercher! Je me suis ennuyé et je suis tellement content de te voir!» Pour un autre enfant ce sera plutôt : « Je ne veux pas arrêter mon jeu avec mon ami et je suis très fâché de devoir partir maintenant ! ». Il m’arrive fréquemment de dire à des nouvelles familles qui partent en fin de journée pour la première fois avec leur enfant de ne pas s’en faire avec les pleurs de leur enfant. L’enfant peut avoir tellement de choses à exprimer suite à cette première journée dans son milieu de garde et ne pas arriver à l’exprimer autrement. Je rassure les parents sur le fait que nous sommes confortables avec les pleurs des enfants quand nous les savons bien entourés de l’amour de leurs parents.
Au plaisir et revenez-nous le mois prochain pour une autre série de billets en collaboration avec Un Autre Blogue de Maman et Naissance Renaissance Estrie! En attendant, la semaine prochaine, on vous parle d’un super livre pour célébrer l’automne!
Élyse Gagnon-Pelletier
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